El Chaltén – marcher vers les cimes
El Chaltén s’éveille lentement, niché au cœur du Parc National Los Glaciares. Quelques rues bordées de maisons de bois, des sacs à dos prêts à partir, et déjà le regard est attiré par une silhouette lointaine : le Fitz Roy, sommet élancé, reconnaissable entre tous par sa face verticale qui accroche les nuages. Ici, les sentiers partent directement du village ou de ses proches environs. Pas besoin de transport ni de longue préparation : on marche, simplement, et le paysage change autour de soi. La Laguna Capri, les miradors du Fitz Roy ou de la Laguna de los Tres… chaque étape révèle une nouvelle perspective sur la montagne. Le ciel joue avec les couleurs, les nuages s’accrochent aux pics, le vent souffle fort puis s’apaise soudain. Les randonnées sont parfois exigeantes, mais jamais monotones. On traverse des forêts de lengas, on longe des rivières aux eaux claires, on grimpe entre rochers et buissons, toujours guidé par la silhouette du massif. Le Fitz Roy ne se laisse pas toujours voir facilement : certains jours, il se cache derrière un voile, comme s’il voulait qu’on le mérite.
Au retour, les jambes sont lourdes, les visages un peu rougis, mais les regards sont calmes. El Chaltén est de ces lieux où l’on ne vient pas chercher une performance, mais un face-à-face intime avec la montagne. Un bout de nature brute, à portée de pas.
Ushuaïa – entre forêts du bout du monde et vents du large
À l’extrême sud du continent, là où la route s’arrête face à la mer, Ushuaïa s’ouvre comme un dernier refuge entre montagne et océan. Ici, tout semble posé entre deux mondes : la forêt et la mer, les sommets et les îles, le silence et le vent. Dans le Parc National de la Terre de Feu, les sentiers longent des baies calmes, des tourbières épaisses, des forêts tordues par le froid. Parfois, un renard traverse le chemin, une buse plane entre les hêtres. L’air y est vif, chargé d’embruns et de racines mouillées. On marche au bord du canal, là où les Andes tombent doucement dans la mer. Puis vient le large. Le bateau glisse sur les eaux grises du canal de Beagle. Sur les petites îles, des colonies d’otaries se disputent les rochers, des cormorans sèchent leurs ailes, immobiles. Plus loin, on aperçoit les silhouettes de manchots qui avancent maladroitement sur la grève, entre algues et galets. Le vent saisit les visages, la mer s’étend jusqu’aux confins, et derrière, rien que l’Antarctique.
À Ushuaïa, tout est plus bas, plus froid, plus vaste. Et pourtant, quelque chose réchauffe : la lumière rasante sur les flots, les reflets d’un ciel changeant, les pas lents dans les bois. Un sentiment discret mais tenace, d’avoir touché le bout d’un monde.